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Enseignement

Le bardo de la réalité absolue 4/8

Chépa Dorjé Rinpoché, Paris le 17 septembre 2001

Nous devons penser que nous écoutons cet enseignement sur les six bardos, sur les six états intermédiaires faisant partie du Dzogchen pour pouvoir aider l’ensemble de tous les êtres à se libérer de la souffrance du samsara, tous ces êtres qui ont été nos pères et nos mères et dont le nombre est aussi vaste que vaste est l’espace.

Quelle est la première chose que nous devons effectuer en commençant la pratique ?

Ce que nous devons avoir, en premier, est un esprit excellent, un esprit très vaste. Ce moyen est l’esprit de l’Éveil, le chemin est le Vajrayana.
Il y a trois sortes d’Esprit d’Éveil :

– l’esprit d’Éveil semblable à un roi,

– l’esprit d’Éveil semblable à un berger,

– l’esprit d’Éveil semblable à un capitaine de navire.

Durant l’écoute de l’enseignement il est nécessaire d’avoir un aspect de cet esprit de l’éveil.

Quel est le sens de l’Esprit d’Éveil semblable au berger ?

Le berger emmène son troupeau dans une terre bien grasse au bord de l’eau pour que son troupeau puisse manger et boire. Quand ils sont repus, le berger emmène son troupeau à l’abri. Puis le berger va penser à lui. Cet exemple est un bon exemple au Tibet car il y a de nombreux troupeaux. Je ne sais pas si cet exemple est valable en France. Peut-être que les bergers français pensent d’abord à manger puis ensuite à faire manger leur troupeau. Le sens est que tous les êtres qui se trouvent dans le cycle des existences expérimentent la souffrance. Nous ne pouvons pas dire qu’il y ait un seul être qui ne subisse pas cette souffrance. Nous pensons que nous écoutons cet enseignement et que nous allons pratiquer le Dharma pour véritablement aider l’ensemble de tous les êtres jusqu’à ce qu’ils atteignent la libération des souffrances.

Tout d’abord nous devons avoir notre propre expérience de la souffrance car si nous ne souffrons pas, nous n’avons pas la possibilité de comprendre la souffrance d’autrui. Quand nous avons eu une expérience de la souffrance que nous savons de quoi nous parlons, nous pouvons nous dire que l’ensemble de tous les êtres expérimentent cette souffrance. En pensant de cette manière, nous ne penserons plus à nous-mêmes, nous nous dirons que l’ensemble de tous les êtres, depuis des temps sans commencement, expérimentent la souffrance. Cela fera disparaître complètement notre expérience propre et il en sera véritablement ainsi.

Cet Esprit d’Éveil est le plus excellent, quoi que nous fassions, que nous lisions des textes, récitions des mantras que nous tournions autour d’un stupa, que nous fassions preuve de générosité, que nous méditions sur la patience, en fait dans tous les actes que nous effectuons, si nous avons cet état d’esprit particulier, c’est un état d’esprit bénéfique aux autres êtres. Le sens premier est d’être bénéfique aux autres êtres. L’ensemble de tous les individus qui pratiquent le Dharma en Occident, font partie du Grand Véhicule, il est bien pour ces personnes d’avoir et de développer cet Esprit d’Éveil.

Que signifie l’Esprit d’Eveil du capitaine du bateau en partance d’une rive à l’autre, tous ensembles, lui et ses passagers en même temps ?

Cela signifie que nous atteindrons l’éveil et l’ensemble de tous les êtres, en un instant, tous ensembles. Dans cet exemple, il reste un aspect de notre propre esprit, de notre propre intellect.

Quel est l’Esprit d’Éveil semblable à un roi ?

Le roi dira : je vais d’abord atteindre l’Éveil puis je vais libérer les autres êtres. Lorsque le roi sera bien installé dans son royaume, il aura du pouvoir puis il pensera aux autres.

Donc, il est bien au départ d’avoir un esprit très vaste et de développer le plus excellent, c’est-à-dire l’état d’esprit du berger.

La dernière fois, nous en étions au moment du Bardo de la Réalité absolue, nous avons vu que les apparences qui émergent sont semblables pour l’ensemble de tous les êtres, ces processus apparaissent pour tous. Si nous n’avons pas un bon entraînement, une bonne absorption méditative, nous ne pourrons pas avoir la reconnaissance du Bardo de la Réalité absolue.

Au moment du Bardo de la Réalité absolue, la sphère de l’élément terre se résorbe dans l’élément terre, la sphère de l’élément eau se résorbe dans l’élément eau. Les quatre éléments se résorbent dans leurs propres éléments. Il va y avoir une dissolution grossière et une dissolution subtile. L’aspect grossier de cette dissolution se passe au niveau de notre corps au moment de la mort. La chaleur quitte notre corps, notre visage change de couleur. Ce sont autant de signes indiquant que les éléments se dissolvent les uns dans les autres. Nous allons alors expérimenter toutes sortes d’apparences. Le mourant peut parler de toutes sortes de choses qui peuvent apparaître. Par exemple, quand la terre va se résorber dans la terre, il va sentir de la lourdeur dans ses membres, il va même aller jusqu’à ne plus les sentir, s’il y a une personne à côté, elle se rendra compte que le mourant ne peut plus bouger. Quand le feu se résorbe dans le feu, toute la chaleur du corps s’échappe, le corps devient froid. Quand l’eau se résorbe dans l’eau, la bouche s’assèche.

L’aspect subtil de la dissolution intervient après la mort, il n’y a plus de corps mais il subsiste de la saisie et toutes sortes d’apparences émergent. Quand les éléments se résorbent les uns dans les autres toutes sortes de lumières apparaissent. Ce sont les apparences de la nature même de notre esprit. L’énergie de notre propre Rigpa, de notre propre Connaissance. Tous les phénomènes extérieurs et intérieurs se transforment en lumières. Cinq sphères lumineuses apparaissent. Dans chacune de ces sphères apparaît une divinité. Du cœur de la divinité des lumières émanent comme les rayons du soleil qui viennent toucher notre propre cœur. Que nous méditions ou pas cette lumière, l’absorption méditative va naturellement apparaître. Lorsque la lumière touchera notre cœur, dans notre absorption méditative naturelle, de la lumière va irradier de notre cœur vers l’extérieur. Cette lumière touchera les sphères lumineuses et les différents corps des divinités qui émergent. Des rayons de lumière de cinq couleurs semblables au soleil émergeront en très grand nombre. Si nous avons eu une bonne pratique pendant ce Bardo de la Naissance, nous pourrons demeurer dans l’état naturel, en absorption méditative quand ces apparences lumineuses émergeront. Les lumières et notre propre Connaissance -Rigpa- seront indifférenciées. Nous pourront alors créer toutes sortes d’émanations pour le bien de tous les êtres.

Si nous ne reconnaissons pas que ce sont nos propres apparences, la lumière va irradier des différentes divinités. Toutes ces lumières vont former de toutes petites sphères lumineuses, ces sphères vont venir se fondre en nous. A nouveau, de la lumière va émaner de nous-même et va irradier tout l’espace. Il y aura comme des filets de lumières. Durant certaines initiations, nous pouvons voir que les Lamas tiennent un « Vajra » avec une petite cordelette de cinq couleurs, elle-même reliée à un mandala. A ce moment précis du bardo, c’est la même chose, des fils, des cordelettes émanent des divinités vers nous, ces filets sont des filets de lumière.

Dans les différentes pratiques que nous faisons, nous méditons de la lumière qui émane de notre cœur et qui se fond dans le cœur de la divinité et inversement. Durant cette vie-ci, nous allons nous entraîner à visualiser tous ces rayons de lumière qui partent de notre cœur et qui partent du cœur de la divinité parce qu’en fait, au moment du Bardo de la Réalité absolue, toutes ces lumières apparaîtront naturellement et spontanément. Plus nous nous entraînerons, plus il nous sera facile de les reconnaître durant le Bardo de la Réalité absolue. Durant les phases de création, quand nous visualisons des lumières qui partent et qui reviennent, ou quand nous recevons des initiations avec la représentation des cordons de protection ; tout ceci facilite l’obtention des accomplissements. Si nous pouvons reconnaître que toutes les lumières du Bardo de la Réalité absolue sont notre propre Rigpa, sans aucune saisie, toutes les lumières s’évanouiront. Si, quand les lumières émaneront de notre cœur pour se fondre dans le cœur de toutes les divinités paisibles et irritées qui apparaissent très nombreuses à leur tour, nous reconnaissons les divinités paisibles et irritées, elles viendront se fondre dans notre cœur.

Quand nous reconnaîtrons que tout ce qui émerge est nos propres apparences, ce sera ce que nous appelons l’Union de la Mère et du Fils. Jusqu’à présent, il y a les apparences et il y a moi, il y a deux choses. Mais si nous avons la reconnaissance que ce sont nos propres apparences, ces deux choses ne sont plus dissociées. Cela dépend véritablement de nous, de notre entraînement. Par la pratique, nous aurons la possibilité, lors du Bardo de la Réalité absolue, de reconnaître ces lumières comme notre propre Rigpa, nos propres apparences. A l’inverse si nous ne pratiquons pas, si nous perdons notre temps, il ne nous sera pas possible de reconnaître ce que sont ces lumières au moment du Bardo de la Réalité absolue. Toutes les apparences qui sont nos propres apparences deviendront des apparences de frayeur, de terreur. Il est nécessaire de s’entraîner pour que dans cette vie, l’absorption méditative soit sans aucune saisie. Dans cette vie-ci, nous sommes composés des cinq agrégats et des six sens. Lors du bardo de la réalité absolue, les cinq agrégats se libére et se transforment en la Clarté Naturelle. Les aspects grossiers et plus subtils des cinq éléments se dissolvent en lumière. Cette lumière se dissout dans la Claire Lumière. Cette Claire Lumière se dissout dans la nature même des phénomènes, appelé Dharmata. Toutes les émotions se libèreront et de même, la Sagesse et la Connaissance. En fait, que nous l’appelions la Connaissance ou la Sagesse, il y aura reconnaissance de l’une ou de l’autre. Avec la Dharmata, ce sera la reconnaissance de la Mère et du Fils. Nous obtiendrons alors les Quatre Sagesses.

A nouveau des lumières apparaissent et émanent de notre cœur. D’abord de la lumière blanche, elle se déploie en vagues de lumière immenses. Au-dessus de cette lumière blanche apparaît une lumière jaune qui se déploie de la même manière. Puis une lumière rouge, puis une lumière bleue et par la suite apparaît une sorte de bol de cristal retourné. D’autres apparaîssent et s’empilent les uns au-dessus des autres. Il y en aura trois, cinq, neuf. Tous seront de couleurs différentes. Si nous reconnaissons que ces différentes apparences sont nos propre apparences, et si nous avons pratiqué Dorjé Sempa dans cette vie-ci, nous pourrons nous libérer au moment du Bardo de la Réalité absolue.

Ensuite une chaîne de lumière apparaît dans notre cœur. Cette chaîne va monter dans l’espace. Si nous pouvons demeurer dans notre propre état de Rigpa sans aucune distraction, si nous avons confiance en nos propres apparences, les lumières deviendront très vastes. A ce moment précis, il est important de reconnaître nos propres apparences .

Tout l’entraînement que nous effectuons durant notre vie va nous permettre la reconnaissance de nos propres apparences, va nous introduire à la reconnaissance de ces apparences, à la nature-même de notre esprit, au fait que notre esprit est vacuité. Toutes ces lumières sont en nous-même, toutes les bénédictions sont en nous-même, nous ne pouvons pas dire que quelqu’un nous donne ces bénédictions, c’est un mensonge, elles sont à l’intérieur de nous-même. En ce qui concerne la bénédiction qui va nous permettre d’aller dans un champ pur de Bouddha, nous ne pouvons pas dire que c’est Bouddha qui va nous guider dans ce champ pur, ce serait un mensonge, cela dépend de nous d’avoir la possibilité de recevoir la bénédiction pour obtenir ce champ pur. C’est le choix de chacun d’entre nous. Nous ne pouvons pas dire que Bouddha lui-même nous donne sa bénédiction. Il a dit :

"Je vous donne le moyen, le chemin pour que vous puissiez obtenir cette grâce, cela dépend de vous de l’obtenir".

C’est grâce aux instructions de notre Lama, grâce aux pratiques que nous pourrons développer la Connaissance car, de toute façon, toutes ces lumières vont émerger au moment du Bardo de la Dharmata. Maintenant nous allons méditer.