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Cérémonie de Guru Bum Tsok

Cette année marque le 1262ème anniversaire de l’arrivée du Maître Padmasambhava au Tibet. En ces temps difficiles en raison des maladies, des guerres et du réchauffement climatique, la prière au Maître Padmasambhava est un moyen puissant de dissiper les obstacles et de propager le Dharma.

C’est pourquoi Lama Kunga Kunchok organise une cérémonie de Guru Bum Tsok et invite, pour cette occasion S.E. Lhatsé Tulku Rinpoché.

L’Association Bouddhique Orgyen Rangdjoung Dorjé Ling (ABCORDL) et le Centre Culturel Tibétain Dzogchenpa (CCTD), fondés par Lama Kunga Kunchok, ont l’honneur d’apporter leur soutien à cet événement.

La cérémonie se tiendra les 24, 25 et 26 mai à la Grande Pagode du Bois de Vincennes. L’événement est gratuit, ouvert à tous sur simple inscription. Les déjeuners et collations sont offerts.


Programme

Vendredi 24 mai 2024
10h à 12h : Guru Bum Tsok
12h à 14h : Déjeuner végétarien offert aux participants
14h à 15h30 : Guru Bum Tsok
15h30 à 16h : Collation offerte aux participants
16h à 17h : Enseignement sur le développement de l’Esprit d’Eveil

Samedi 25 mai 2024
10h à 12h : Guru Bum Tsok
12h à 14h : Déjeuner végétarien offert aux participants
14h à 15h30 : Guru Bum Tsok
15h30 à 16h : Collation offerte aux participants
16h à 17h : Initiation du Rigdzin Dupa

Dimanche 26 mai 2024
10h à 12h : Guru Bum Tsok
12h à 14h : Déjeuner végétarien offert aux participants
14h à 15h30 : Guru Bum Tsok
15h30 à 16h : Collation offerte aux participants
16h à 16h30 : Enseignement sur le Rigdzin Dupa
16h30 à 17h : Initiation de longue vie du Longchen Nyingtik
17h à 17h30 : Mandala de remerciements

Pour vous inscrire à cet événement, veuillez remplir le formulaire en ligne :

Formulaire d’inscription


Les bienfaits du Guru Bum Tsok

Émanation unifiant en elle la sagesse connaissante de notre enseignant sans égal – le Seigneur des sages –, du parfait bouddha Amitābha ainsi que du Seigneur du monde qu’est le tout-puissant exalté Avalokiteśvara, le maître Padmasambhava est le second bouddha d’Oḍḍiyāna loué dans les écritures telles que celle du Filet Magique de Mañjuśrī.

Au lever du soleil, le dixième jour du mois et de l’année du singe, il s’est miraculeusement manifesté au sud-ouest du pays d’Oḍḍiyāna, dans le cœur d’un lotus sur une île du lac Sindhu, le « lac de lait ». Ayant ainsi pris naissance, il œuvra de manière inconcevable pour le bien des êtres à Oḍḍiyāna et dans de nombreuses régions, Tagzik, Gilgit, Baltistan, Ladakh, Cachemire, Inde, île de Laṅkā, Drāvida, Sumatra, Bengale, Népal, Bouthan, Kāmarūpa à l’est, Khotan, Chine, etc.

Puis, à un moment donné, lorsque ses altruistes prières d’aspiration antérieures arrivèrent à maturité, il accepta l’invitation de Trisong Detsen – le trente-huitième souverain de la dynastie tibétaine – et, en l’année eau-tigre (762), se rendit au pays des neiges, territoire le plus haut de notre planète qui a été loué dans les écritures du Victorieux comme étant le champ de conversion du sublime Avalokiteśvara. Là, sur les rives du Yarlung Tsangpo, l’abbé, le maître et le roi du Dharma se réunirent à Drakmar Ombutsel experts dans les méthodes habiles pour discipliner ceux qui doivent l’être, ils œuvrèrent si bien à travers les quatre sublimes moyens d’attraction et autres que tous les humains et non-humains entrèrent dans la sainte Doctrine, par la manière pacifique ou courroucée. Samye – l’inconcevable monastère immuable et spontanément établi – fut érigé selon trois styles et de nombreux enseignements des sūtras et tantras furent traduits après qu’un premier édit ait été publié pour le roi du Tibet et ses sujets. L’abbé et le maître mirent tous deux en place une communauté monastique initiée par les « sept hommes à l’essai » et établirent un collège d’étude et de méditation.

Le maître Padmasambhava se rendit miraculeusement dans le Tibet occidental, oriental et central. Que ce soit dans les montagnes neigeuses, les rochers ou les lacs, il pratiqua dans tous les lieux sacrés et les bénit. Afin que les enseignements des sūtras et tantras se diffusent largement dans le futur et, plus spécialement, afin que la puissance des bénédictions des mantras secrets ne disparaisse pas, après avoir concentré les instructions essentielles des tantras, il dissimula en tant que termas d’innombrables trésors spirituels tels que les « cent trésors pour soutenir la force vitale du roi » ou les « cinq grands trésors de l’Esprit ». Il prophétisa alors qu’ils seraient révélés dans le futur par de nombreux grands êtres de l’école ancienne et des écoles nouvelles qui apparaîtraient successivement et il transmit ces enseignements à chacun d’eux par mandat de l’esprit en accompagnant sa prophétie de prières d’aspiration. Dans les zones rocheuses de Samye Chimphu, de Shotö Tidro et d’ailleurs, il tourna la roue du Dharma des neuf Véhicules en transmettant notamment à ses disciples fortunés les enseignements des trois classes de tantras intérieurs tels que le Dzogchen Sangwa. En œuvrant ainsi, la lampe de la sainte Doctrine illumina la terre entière. Des accomplis des deux types de saṅgha ayant atteint la suprême réalisation, à commencer par les vingt-cinq disciples, roi et sujets, se manifestèrent sans interruption et cette lignée de transmission mêlant kamas et termas en un seul courant dans les instructions qui font mûrir et libèrent l’esprit, se développa pendant cinquante ans. C’est sur cette base que le système philosophique nyingmapa des anciennes traductions émergea et se diffusa au Tibet avec ses enseignements unissant sūtras et tantras qui embrassent la totalité de la Doctrine du Victorieux. Qui plus est, sur un plan général, le maître Padmasambhava – le second bouddha d’Oḍḍiyāna–, œuvre de manière inconcevable pour le bien des êtres dans le milliard de champs du système cosmique de Sahā et plus spécialement dans toutes les régions du Continent des Jambosiers, avec sa sagesse, son amour et sa capacité. En particulier, il embrasse dans sa compassion les disciples de notre époque marquée par les cinq dégénérescences rampantes et leur adresse avec force de profonds souhaits, ce qui a fait dire à Jamgön Mipam Rinpoché, une émanation de Mañjuśrī manifestée parmi les hommes :
Bien que la dégénérescence s’intensifie comme les ténèbres, l’activité de Padma, le seigneur des Victorieux, brille comme la lune. C’est pourquoi les bénédictions du précieux maître d’Oḍḍiyāna pénètrent l’esprit sauvage des êtres de ces temps dégénérés à la mesure des facteurs afflictifs qui se développent en eux.

Le précieux maître d’Oḍḍiyāna lui-même a dit :

Vous mes disciples qui souhaitez quitter le saṃsāra,
Adressez-moi continûment vos prières avec foi et dévotion.
Sur un ton affligé semblable à celui d’un enfant appelant ses parents au secours
Et mélodieux comme le son mélancolique du luth ou de la flûte,
Priez aux six veilles du jour et de la nuit !
Et il est écrit également dans un terma :
Méditez sur Padmasambhava
Avec un corps à la forme insubstantielle et lumineuse.
Générez alors la fierté de sa grandeur
Et récitez avec ferveur et sans interruption
Le mantra quintessentiel de Thötreng Tsal,
Comme un torrent dévalant des rochers.
Je ne pourrai moi-même faire autrement que de venir.
Lorsque vous dirigerez d’intenses prières
Vers moi, Padma d’Oḍḍiyāna,
Avec le respect né d’une forte dévotion
Et un intense sentiment de ferveur,
J’arriverai devant vous.

Comme le montrent ces mots, c’est avec dévotion que nous devons nous focaliser par l’esprit, le cœur et les tripes sur le précieux maître d’Oḍḍiyāna, sans nous contenter de prononcer de simples mots et nous devons mobiliser la foi et la vision pure avec le sentiment d’être en présence réelle d’un bouddha. Si nous prions avec concentration après avoir récité la Prière en sept vers et le Bendza Guru Mantra les bénédictions nous pénètreront rapidement, les obstacles liés aux seize formes de peurs telles que celle d’une mort avant l’heure seront dissipées alors que la longévité et les mérites s’accroîtront. Ultimement, nous rencontrerons le précieux maître d’Oḍḍiyāna, nous entendrons ses paroles et nous renaîtrons au couchant, en la Terre pure de félicité.

Tels sont certains des bienfaits inconcevables de cette pratique. En outre, on trouve ceci dans les « Bienfaits du Siddhi » du grand tertön Karma Lingpa :

Jadis, dans le glorieux [monastère de] Samye,
La dame Yeshe Tsogyal
Offrit au Seigneur d’Oḍḍiyāna
Le suprême maṇḍala extérieur, intérieur et secret.
Puis, elle se prosterna avec dévotion et s’adressa à lui :
« Dans le futur, les êtres auront l’esprit dispersé.
Incorrigibles, ils auront une vision gravement erronée de la Doctrine.
En particulier, ils seront nombreux à générer une vue fausse des profonds mantras secrets.
En ces temps-là, lorsque le Tibet sera affligé
Par les trois fléaux que sont la maladie, la guerre et la famine,
De nombreux rituels bénéfiques auront beau exister,
L’opportunité de les accomplir ne se présentera pas et les obstacles seront grands.
Les substances et instruments [pour ces rituels] ne pourront être réunis au complet
Et les êtres de ces temps mauvais vivront en désaccord.
[Aussi,] veuillez expliquer tous les bienfaits qu’il y aura
À accomplir, à ce moment-là, la pratique du maître que vous êtes ».
Le grand maître répondit :
« Pieuse femme, tu as raison.
En vue d’une telle époque future,
J’ai dissimulé de nombreux trésors bénéfiques
Mais à cause [du manque de] mérites des êtres,
Il sera très difficile de réunir les circonstances propices [pour leur révélation].
Cependant, en ce genre d’époque,
Si, dans les lieux sacrés, les grands monastères,
Au sommet des hautes montagnes ou au bord des fleuves,
Sur les sites miraculeux des dieux et des esprits,
Les tantristes préservant leurs samayas,
Les moines et moniales gardant leur discipline,
Les hommes pieux
Et les femmes de qualité
Récitent cent, mille, dix-mille, cent mille, dix millions de fois ou plus encore
Le mantra quintessentiel qu’est le Bendza Guru
Avec l’excellente motivation de l’esprit d’éveil,
Il en découlera d’inconcevable bienfaits.
Maladies, influences nocives, guerres, conflits,
Mauvaises récoltes, famines et manifestations illusoires seront pacifiés.
La pluie tombera au moment opportun
Et le pays connaîtra la bonne fortune, la vertu et l’excellence.
Dans cette vie, la suivante ou le bardo on verra en réalité ou, à défaut, dans les expériences spirituelles et les rêves, le visage du grand maître d’Oḍḍiyāna et on entendra alors ses profondes et mélodieuses paroles. Plus tard, à Ngayab Palri, on intègrera l’assemblée des vidyādharas masculins et féminins et on y pratiquera les mantras secrets. On franchira ainsi les Terres et les Voies pour atteindre le plein éveil. Qui récite cent fois sans interruption ce Bendza Guru quintessentiel, Sera apprécié par les autres
Et bénéficiera sans effort de nourritures, richesses et jouissances.
Qui le récite mille ou dix-mille fois
Submergera de sa splendeur les perceptions d’autrui
Et l’énergie des bénédictions ne connaîtra aucune entrave.
Qui le récite cent mille ou dix millions de fois,
Amènera les trois mondes sous son contrôle,
Subjuguera avec éclat les trois plans d’existence
Assujettira tous les dieux et esprits, sans exception.
Mènera sans obstacle les quatre activités éveillées
Et œuvrera de manière inconcevable pour le bien des êtres
En fonction de ses souhaits personnels.
Qui le récite trente millions ou soixante-dix millions de fois
Assujettira les huit classes de dieux et d’esprits
Sans jamais être séparé des bouddhas
Ni dissocié du Seigneur d’Oḍḍiyāna
Et toutes les tâches qu’il leur confiera seront accomplies.
Les meilleurs [pratiquants] réaliseront en cette vie le corps d’arc-en-ciel,
Les pratiquants intermédiaires embrasseront la Claire Lumière au moment de la mort
Et les moins bons se libèreront du saṃsāra dans le bardo.

Comme on le voit dans ces mots, le potentiel des bienfaits de cette pratique est inconcevable
et les décrire serait sans fin.


Voici l'article du jour :

Cinq agrégats, cinq éléments, cinq perfections, cinq sagesses

Nous devons penser que nous allons écouter cet enseignement pour libérer tous les êtres qui se trouvent dans la souffrance du samsara et dont le nombre est aussi vaste que vaste est l’espace.

Les fois précédentes, nous avions parlé de la motivation. Cette motivation ne doit pas durer un jour, elle doit être permamente. C’est-à-dire qu’il n’est pas bénéfique d’être motivé un jour, puis ne plus l’être le lendemain.

Pourquoi cela ?

Parce que d’une manière générale, notre esprit n’a pas de stabilité : il change très rapidement. C’est pour cela qu’il faut s’entraîner à avoir continuellement cette motivation à l’esprit. Quoique nous fassions nous allons examiner notre esprit et nous verrons quelle est notre motivation. C’est avec cette motivation de départ que nous allons effectuer l’activité.

Comme nous l’avions vu précédemment, l’ensemble de tous les phénomènes extérieurs est comme un mandala. Qu’est-ce que cela veut dire ? Que l’ensemble des trois mondes, c’est-à-dire l’ensemble de notre univers n’est pas perçu comme quelque chose d’impur mais comme quelque chose de parfaitement pur. C’est cela le mandala.

Comme nous avons déjà vu, notre corps qui est composé de cinq agrégats intérieurs. Le monde est composé des cinq éléments. Les cinq éléments extérieurs sont les cinq aspects féminins ou les cinq parèdres. Les cinq agrégats qui composent notre corps sont les cinq aspects masculins. Les aspects masculins et féminins ne veulent pas dire homme et femme.

Si nous n’avions pas ces cinq agrégats à l’intérieur de notre corps, (les agrégats ici sont les cinq organes des sens, l’organe de l’ouïe, de la vue, de l’odorat, du goût…), toutes les apparences extérieures, c’est-à-dire tous les objets des sens que nous pourrions percevoir ne nous nuiraient pas ou ne nous seraient pas bénéfiques. Il n’y aurait pas un lien de nuisance ou de bénéfice s’il n’y avait pas ces organes des sens.

C’est donc par rapport à ces perceptions, ces organes des sens intérieurs, qu’apparaissent les aspects extérieurs, les cinq aspects féminins. L’ensemble de toutes les apparences extérieures est vacuité car la nature même de ces apparences est vacuité. La nature même du son est vide, vacuité. Il existe un lien entre les perceptions et les organes des sens. C’est sur le support des organes des sens qu’il y a l’aspect extérieur. C’est sur le support de l’aspect extérieur qu’il y a l’ organe des sens, c’est-à-dire qu’il y a l’objet perçu, il y a véritablement un lien entre les deux.

Ainsi il y a l’apparence extérieure : une forme et l’agrégat, c’est-à-dire l’organe de la vue, qui va percevoir cette apparence extérieure. L’organe des sens va saisir l’objet extérieur, nous allons penser : « Cet objet est beau. » ou « Cet objet n’est pas beau. ». Nous allons avoir cette saisie du beau ou du pas beau. En réalité la nature-même de cet agrégat, de cet organe de la vue, est parfaitement pure depuis des temps sans commencement. De même la nature même de cet objet extérieur est vacuité. Donc s’il y a reconnaissance que la nature même de cet organe des sens est parfaitement pure depuis des temps sans commencement et que la nature même de l’objet extérieur perçu est vacuité, la pensée qui émerge sera elle aussi reconnue comme une pensée pure.

C’est pour cela qu’il est dit que la nature même de toutes ces pensées est l’esprit de l’éveil, c’est l’éveil.

La nature même de ces pensées est parfaitement pure depuis des temps sans commencement. Il n’y a rien à fabriquer. Il n’y a pas à fabriquer cette pureté car la nature même de ces pensées, et ce depuis des temps sans commencement, est parfaitement pure.

Dans la loi d’interdépendance cela veut dire qu’une chose est le support de l’autre (le support et ce qui émerge du support). Par exemple c’est sur le support de l’écriture, donc des lettres, que je vais pouvoir avoir la compréhension, donc que je vais pouvoir lire. C’est pour cela qu’il est nécessaire d’avoir la compréhension des deux, c’est-à-dire des objets extérieurs et des apparences intérieures, c’est-à-dire des organes des sens. Il est nécessaire d’avoir la compréhension des deux pour réaliser la pureté des deux.

En fait, l’ensemble de tous les êtres sont Bouddha mais nous ne reconnaissons pas que notre propre nature est cet état de Bouddha et que l’ensemble de notre monde est comme un paradis pur.

Pourquoi ne reconnaissons-nous pas que notre monde est un paradis pur ?

C’est parce que nous ne reconnaissons pas la nature pure de notre esprit. C’est parce que notre esprit est dans l’illusion que nous ne reconnaissons ni la nature essentielle des phénomènes extérieurs ni celle de notre esprit. Notre esprit est impur parce que nos propres apparences sont perçues dans l’illusion.

Le grand pratiquant, le Neldjorpa aura la reconnaissance de la nature essentielle des phénomènes extérieurs et de son propre esprit. Il reconnaîtra les trois mondes inférieurs [1] comme des paradis purs.

Comment apparaît l’illusion et pourquoi ?

Prenons l’exemple de quelqu’un qui a la jaunisse. Tout ce qu’il voit apparaît jaune. Par exemple s’il voit une conque blanche, il la percevra comme étant de couleur jaune. Si nous lui demandons quelle est la couleur de cette conque, il répondra : « Elle est jaune. ». Pourtant elle est blanche, mais il la verra jaune !

Tous les êtres, nous y compris, sommes malades. Malades des émotions perturbatrices, c’est-à-dire que nous n’avons pas la possibilité de reconnaître la pureté même du monde, la pureté des pensées, parce que nous sommes dans l’émotion.

Prenons un autre exemple, l’exemple de montagnes enneigées. La neige qui recouvre ces pics, ces montagnes, est blanche mais, si une personne a des défauts de vision, dira : « Ces montagnes sont noires. » Mais cette neige n’est pas noire, elle est blanche.

Au temps du Bouddha Shakyamuni, un moine nommé Sharipu ne percevait pas le monde comme un paradis pur de Bouddha. Un autre moine avait réalisé la pureté de tous les phénomènes. Ils débattaient tous les deux de la vision extérieure et intérieure qu’ils avaient du monde. Le Bouddha Shakyamuni, de par sa réalisation, a réalisé un miracle. il a montré la pureté de tous les phénomènes à Sharipu. Il lui a montré que tout était un paradis pur. Il lui a dit : « Regarde, voici la nature pure de tous les phénomènes. Auparavant tu n’avais pas la possibilité de voir cette pureté à cause de l’illusion. Tous les êtres sont exactement comme tu l’étais auparavant, tout comme toi il ne peuvent pas voir cette nature même. »

C’est pourquoi, lors du dernier enseignement, nous avions évoqué les cinq choses excellentes à connaître.

C’est tout d’abord le lieu excellent. Nous devons percevoir le lieu où nous sommes comme un paradis pur. Ensuite l’enseignant excellent, nous devons reconnaître la nature même de l’enseignant en le considérant comme étant le Bouddha lui-même. Puis les auditeurs excellents, nous devons reconnaître que la nature même de tous les auditeurs, c’est-à-dire ceux qui écoutent l’enseignement, est la nature de l’état de Bouddha, celle de l’état d’éveil. Ensuite, nous avions vu qu’il y avait toutes sortes de temps excellents et que nous devions les reconnaître. Le temps excellent était le temps où le Bouddha était présent et c’était celui de l’enseignement. Nous pouvons voir aussi que le temps est un état parfaitement pur ; voir de cette manière est bien et correcte. Et finalement, nous avions vu qu’il y avait l’enseignement excellent. Le sens véritable que tout est parfaitement pur n’est rien d’autre que cela.

C’est pourquoi, dans la tradition bouddhiste, dans le Dharma, il est dit qu’il est très important de voir ces cinq aspects excellents durant l’enseignement.

C’est ainsi que l’enseignant va voir l’ensemble de tous les étudiants, tous ceux qui écoutent, comme des Bouddhas, c’est-à-dire qu’il va reconnaître en chaque être la nature pure de Bouddha. De même les étudiants vont voir la nature même du maître comme cet état d’éveil, cet état de Bouddha. S’il y a cet échange du maître au étudiant et du étudiant au maître les liens d’engagement ne sont pas brisés.

Cette vision va se développer grâce à la foi et la dévotion, grâce à la la confiance mutuelle que le maître a envers les étudiants et que les étudiants ont à l’égard du maître. C’est pour cela qu’en signe de respect, les étudiants ne s’asseoient pas se mettre sur un siège élevé ou sur un trône. Bien entendu, si une personne est malade, si elle a mal aux jambes, c’est un peu différent, mais le respect demeure présent.

Il est stipulé dans les textes, par signe de respect, qu’il n’est pas convenable de s’asseoir sur un trône. On dit aussi qu’il n’est pas bien sauf si l’on est malade, de se couvrir la tête car cela est aussi un signe d’irrespect.

Un autre signe d’irrespect est d’arborer un parapluie ou une ombrelle ouverts. Bien évidemment il y a parfois des circonstances particulières nécessitant un parapluie ou une ombrelle, mais en règle générale c’est un signe d’irrespect.

Il est encore stipulé que de porter une arme, un revolver ou un couteau sur soi durant l’écoute de l’enseignement est un signe d’irrespect.

Toutes ces attitudes sont des signes d’irrespect pendant l’écoute de l’enseignement mais pas en dehors.

Il faut aussi éviter de s’endormir durant un enseignement ou de ne pas écouter l’enseignement ou d’avoir trop d’agitation dans son esprit. Il faut simplement développer une motivation parfaitement pure. Si nous avons tous ces défauts, notre motivation n’est pas parfaitement pure. La motivation parfaitement pure c’est voir le Lama comme étant parfaitement pur par notre foi, par notre dévotion. En développant ce genre de motivation durant l’écoute du Dharma, nous pourrons acquérir la compréhension du sens profond du Dharma, acquérir cette vison pure et l’écoute de l’enseignement sera d’un grand bienfait.

Le sens du Dharma reste inchangé, mais la compréhension dépend de la possibilité intellectuelle de chaque individu. Pendant l’enseignement, chacun va comprendre suivant sa propre capacité intellectuelle. Cela veut dire que lorsque Bouddha enseignait, certains êtres ont compris directement le sens de la Grande Perfection : le Dzogchen. D’autres ont compris les Soutras, et d’autres comment discipliner leur esprit. Cela montre bien que la compréhension dépend de la capacité intellectuelle de chaque personne.

Dire : « Je veux le Dzogchen tout de suite. », cela n’a pas de sens car c’est au travers de la foi, de la dévotion, par la vue pure que nous allons naturellement réaliser le Dzogchen, le sens même du Dzogchen.

Dans le Dharma, il y a comme des lois, si on pense qu’il n’y en a pas, ce n’est pas juste, ces lois existent, même pour moi.

Quelles sont ces lois ?

Pour le maître qui enseigne le Dharma, s’il enseigne en ayant de l’orgueil, il n’a pas de pouvoir, dans le sens qu’il ne maîtrise pas le Dharma, car il est bien dit dans les textes, dans le Dharma même, qu’il ne faut pas avoir d’orgueil.

Si je me dis : « Je suis vraiment quelqu’un, je suis un grand érudit du Dharma que j’enseigne et je le connais parfaitement ! », cela signifie que je n’ai aucune maîtrise, aucun pouvoir quant à ce Dharma que j’enseigne. Si je pense : « Je suis quelqu’un de grand, je suis quelqu’un qui a une grande omniscience, une grande connaissance du Dharma ! », c’est que je ne le maîtrise pas.

Si, encore, je me dis : « Je vais devenir quelqu’un avec une grande renommée grâce au Dharma. », là encore, je n’obtiens absolument aucune maîtrise de ce qu’est le Dharma.

Si je me dis aussi : « S’il y a un très grand nombre de personnes qui m’écoutent c’est le Dharma, mais si il n’y a personne pour m’écouter ce n’est pas le Dharma », là encore, je ne maîtrise pas ce qu’est le Dharma.

Si je me dis encore : « Je vais donner maintenant l’enseignement pour pouvoir obtenir plein d’argent », si je donne l’enseignement avec cet état d’esprit, vous ne pouvez pas recevoir le Dharma et moi, je ne peux pas l’enseigner véritablement.

Donc, qui est cette personne qui enseigne véritablement le Dharma ?

C’est celui qui, par la compréhension qu’il a eue du Dharma et l’énergie, la capacité qu’il a acquises grâce à la compréhension du Dharma, se dit : « Maintenant je vais transmettre pour le bien de tous les êtres, pour être bénéfique à l’ensemble des êtres ». Un tel être enseigne véritablement le Dharma et même s’il n’est pas un grand érudit, il est un enseignant du Dharma. Celui qui fait naître en lui ce désir d’être bénéfique à autrui, de pouvoir aider autrui et qui donne les enseignements avec cette motivation d’aider les autres, est doté du sublime esprit d’éveil.

L’enseignant peut aussi penser : « Tous les êtres qui m’écoutent sont Bouddha, ainsi le Dharma que j’enseigne est une offrande que je leur fais. », penser de cette manière-là, c’est bien aussi.

Il y a les règles observées par les étudiants. Quelles sont ces règles ?

Quand un étudiant ne comprend pas, il est important que ce étudiant pose sa question et dise : « Je n’ai pas compris. ».

C’est bien qu’il pose des questions au Maître mais il ne doit pas penser : « J’ai tout compris ! », ni penser : « Je suis l’égal du Maître puisque j’ai tout compris ! », sinon l’étudiant développe de l’orgueil. Il est important de comprendre cela car si l’étudiant développe de l’orgueil, il n’a pas la possibilité de discipliner son courant de conscience.

Si durant l’écoute de l’enseignement, nous pensons : « Ce que le Maître est en train de dire, c’est exactement pour moi qu’il le dit. », cela signifie qu’il y a compréhension de ce qu’il est en train de dire. Si à l’inverse nous nous disons : « Ce qu’il est en train de dire, c’est pour lui, il a tous ces défauts. », c’est que nous ne comprenons pas vraiment l’enseignement.

Car la tradition même dans le Dharma, dans le bouddhisme, durant l’écoute de l’enseignement, nous devons vraiment développer grâce à cette écoute, grâce à la foi et à la dévotion, la Vue Pure.


Si vous avez des questions...

Q : Je n’ai pas compris l’exemple de la conque...

R : Nous disons que tous les êtres ordinaires sont dans l’illusion, à cause de leurs saisies, donc l’ensemble de tous les êtres qui se trouvent dans le cycle des existences sont dans l’illusion. Malgré le fait que depuis des temps sans commencement ce monde est parfaitement pur, et donc que tous les êtres qui s’y trouvent sont eux aussi parfaitement purs, que la nature de tous ces êtres est l’état de Bouddha, qu’ils sont Bouddhas ; les êtres n’ont pas la reconnaissance de cette nature pure. Parce qu’ils n’ont pas la reconnaissance que tout est parfaitement pur et qu’eux-mêmes sont Bouddhas, ils sont dans l’illusion. Prenons l’exemple de la conque, quelqu’un qui a une hépatite, va voir tout en jaune. Malgré le fait que la conque soit blanche, il va la voir jaune à cause de l’hépatite. Si cette personne ne sait pas qu’elle a une hépatite, pour elle, la conque sera jaune. Si quelqu’un lui dit : « Mais non, la conque n’est pas jaune, elle est blanche ! », elle ne va pas comprendre, elle ne va même pas pouvoir l’intégrer dans son esprit, car pour elle cette conque est jaune, elle n’est pas blanche, parce qu’elle ne comprend pas la nature même des choses.

Q : Rinpoché, vous nous avez parlé des agrégats, j’ai pensé skandhas, et puis vous avez dit que c’étaient des consciences, les sens, les six consciences. Je ne comprends pas trop. Les skandhas, les agrégats, pour moi, c’est forme, sensation, perception...

R : Bien entendu, ce sont deux choses différentes, quand on parle des cinq agrégats et quand on parle des six organes des sens, c’est différent, mais c’est sur le support de ces cinq agrégats qu’il y a saisie sur les apparences extérieures. Tout cela est interdépendant, c’est quelque chose de différent, malgré tout, c’est interdépendant. Donc, l’un ne va pas sans l’autre. Extérieurement, il y a les cinq éléments, ce sont les objets extérieurs que l’on va saisir. Nous avons vu que les agrégats intérieurs étaient l’aspect masculin et que les apparences extérieures étaient l’aspect féminin, les cinq younas (éléments). Sur le support des apparences extérieures, il y a les cinq agrégats intérieurs et sur le support des cinq agrégats intérieurs, il y a les apparences extérieures. Ce qui veut dire que s’il n’y a pas d’apparences extérieures, il n’y a pas d’agrégats intérieurs et inversement, s’il n’y a pas d’agrégats intérieurs, il n’y a pas d’apparences extérieures. Sans l’un, il n’y a pas l’autre. Ils sont liés.

Q : Agrégats, qu’est-ce que c’est en tibétain ?

R : Ça se dit Poungpo. Il y a l’agrégat de la forme, l’agrégat de la sensation, l’agrégat de la perception, l’agrégat de du concept ou des facteurs mentaux et l’agrégat de la conscience. C’est sur le support de ces cinq agrégats qu’il y a les six organes des sens.

Q : Je voulais poser une question à propos de la prise de notes. Ne s’agit-il pas d’une saisie supplémentaire ? Qu’en pense Rinpoché ? Et, traditionnellement, encourage-t-on la prise de notes ?

R : En fait, cela dépend de chaque individu. Certains individus vont avoir une très grande clarté, c’est-à-dire que, en prenant des notes, ils auront la possibilité d’écrire aussi vite que ce qu’ils entendent donc à ce moment-là, cela ne posera pas de problème. D’autres personnes n’auront pas cette possibilité-là, ils vont en perdre en route. Si c’est le cas, il vaut mieux ne pas prendre de notes. Traditionnellement, cela ne se faisait pas mais là, la tradition est complètement différente. Au Tibet, chacun avait le texte puisque chacun connaissait le tibétain. L’enseignant faisait le commentaire, et les étudiants suivaient en même temps que l’enseignant. S’il y avait des questions précises concernant certains aspects du texte, ils posaient des questions. Ils n’avaient pas besoin d’écrire puisqu’ils avaient le texte, qu’ils regardaient en même temps que les commentaires de l’enseignant. ici les choses sont un petit peu différentes et si, par exemple, on prend des notes, quand on rentre chez soi, on peut relire les notes et c’est plutôt bien de relire les notes. Mais si on prend des notes sans les relire à la maison, car on a mis le cahier de côté sans l’ouvrir, si on ne lit pas le sens de l’enseignement, à ce moment-là, on n’en retire aucun bienfait.

Q : Est-ce que les cinq agrégats sont reliés aux sagesses ?

R : Bien sûr qu’il y a un lien, car ces cinq agrégats grâce à leur nature même sont les cinq sagesses. Et si l’on ne reconnaît pas la nature même de ces cinq agrégats, à ce moment-là, on voit la conque jaune.

Q : Quel est le sens de la prise de refuge ultime ?

R : Tu auras la réponse du refuge ultime, la signification du refuge ultime, en retraite.

Q : Par rapport à ce que j’ai compris, il y a cinq sagesses. La sagesse vis-à-vis des biens matériels, quelle est-elle ?

R : C’est la sagesse de l’accomplissement.

Q : Je ne comprends pas.

R : La sagesse de l’accomplissement, à ce moment-là, ce sont les cinq sagesses car dans un objet, donc dans la richesse, se trouvent les cinq sagesses. Par exemple, la tasse est composée des cinq éléments, la tasse est composée de l’élément vent, de l’élément terre, de l’élément eau, de tous les éléments et donc, la nature même de ces éléments, ce sont les cinq sagesses.

Q : C’est-à-dire que si l’on possède un objet, on a les cinq sagesses ?

R : En fait, il ne faut pas reconnaître les cinq sagesses dans l’élément extérieur, il faut reconnaître les cinq sagesses à l’intérieur de notre propre esprit. Car si l’on se disait : « Voilà, j’ai cet objet et j’ai les cinq sagesses », ce serait comme voir la conque jaune alors qu’elle est blanche.

Q : C’est-à-dire, cela vient de l’intérieur aussi, c’est une espèce de communion avec l’objet et le corps, c’est cela ?

R : Oui, bien sûr qu’il y a un lien entre l’intérieur et l’extérieur, si l’on a la compréhension à l’intérieur, nous reconnaissons toutes les apparences extérieures comme étant les cinq sagesses. Les cinq sagesses se déploient ou se manifestent à l’extérieur si elles se manifestent à l’intérieur.

Q : Elles sont invisibles ou on les voit ? Par exemple, dans un dessin, on pourrait faire un dessin représentant les cinq sagesses ?

R : Si l’on pouvait dire et si l’on pouvait voir les cinq sagesses, au travers d’un dessin ou au travers d’autre chose, si on les voyait extérieurement, à ce moment-là, on les détruirait, on les détériorerait.

Q : Je voulais poser une question à propos de l’orgueil, est-ce que l’antidote de l’orgueil, c’est l’humilité, c’est de reconnaître et se dire : « Cela, je ne le sais pas », est-ce l’humilité ? [La traductrice s’excuse : « Je suis désolée, parce que j’ai demandé à Rinpoché : « qu’est-ce que l’antidote de l’orgueil », je n’ai pas dit le moyen. Donc, je me suis dit que, peut-être il valait mieux que je dise moyen, ce qu‘exactement tu avais demandé.]

R : « Le moyen de contrer l’orgueil, c’est l’esprit d’éveil ». Le moyen pour éradiquer l’orgueil c’est l’esprit d’éveil paisible ou l’esprit d’éveil de la pacification, cela veut dire, à partir du moment où l’on veut être bénéfique à autrui, à ce moment-là, on ne peut pas avoir d’orgueil en voulant être bénéfique à autrui.

Q : Pourquoi l’esprit de l’éveil de la pacification ? Cela veut-il dire qu’il y en a plusieurs ?

R : Il y a l’esprit de l’éveil relatif, d’un point de vue relatif, dans la vérité relative et l’esprit d’éveil, dans la vérité ultime. Si l’on développe le fait de vouloir aider autrui ou plutôt d’être bénéfique à autrui, de faire le bien d’autrui tout en pensant je vais faire le bien d’autrui, il s’agit là de l’esprit de l’éveil relatif. Et, si l’on reconnaît, si l’on réalise la nature même de notre propre esprit, il s’agit de l’esprit de l’éveil ultime, c’est-à-dire que l’on ne réfléchit pas, l’on n’a pas besoin de réfléchir à l’esprit de l’éveil, il est naturellement présent, c’est cela l’esprit de l’éveil ultime.